Mon nom est Samuel Biléou Joseph OSCHOFFA.
Je suis né en 1909 à Porto-Novo. Mon père est protestant et se nomme Joseph OSCHOFFA. Il
exerçait la profession de menuisier.
Ma mère, vendeuse de tissus, se nomme Fohoun.
Mon père avait perdu plusieurs enfants en bas âge. IL ne survécut qu’une fille, ma grande sœur,
nommée Elisabeth.
Cependant, mon père ne perdit pas confiance. Il s’adressa pieusement à Dieu ; le suppliant de lui
accorder un garçon qu’il mettrait au service de l’Eternel s’il survivait. Quand il fut exaucé, il me
donna le nom de Samuel et ajouta à l’intention de l’assistance un nom Yoruba << Biléou >> ce qui
signifie << s’il te plait de rester ici-bas, reste. Dans le cas contraire, retourne au Seigneur. Quant à
moi, je t’avais consacré à l’Eternel avant même ta naissance >>.
En 1916, lorsque j’eus sept ans, mon père tint sa promesse et me confia à un catéchiste protestant, M.
MOÏSE GNANSOUNOU ( quartier Zèbou ), père du feu Nathaniel A. GNANSOUNOU, pour assumer
mon éducation. Mais j’étais trop jeune et il fut obligé de me garder encore jusqu’à l’âge de 13 ans.
Puis, il me remit en 1928 au Pasteur David Hodonou Loko à qui il fit savoir sa promesse faite à Dieu
de me laisser au service de l’Eternel.
Elève à l’école protestante ( quartier Houèzoumè ), j’étais interne chez le Pasteur Loko. Nous étions
plusieurs condisciples dont l’éminent évangéliste GNANSOUNOU Nathaniel bien connu dans l’Eglise
du christianisme céleste. Durant six années, je fis mes études primaires jusqu’au cours moyen 2ém
année. Notre éducation était rude. Je n’avais pas la force physique qu’il fallait pour continuer et
m’évadai pour rejoindre mon père. Toutes tentatives de ce dernier pour me remettre à mon patron
échouèrent. Excédé et découragé, il dut me laisser à son atelier.En effet mon père était menuisier.
J’avais donc fui la force pour la force. Mais je me résignai et obtins ma libération après quatre
années d’apprentissage. Puis je continuai à exercer le métier dans le même atelier que mon père.
Mais le 15 Juin 1939, mon père mourut. C’est alors que je me débarrassai du travail épuisant en
abandonnant la menuiserie un AN APRES
.
Aussi , m’interessai-je plus particulièrement à la fanfare municipale où j’étais trompettiste du vivant
de mon père.
Peu après, je remarquai que cette situation de trompettiste était bien précaire et je me résolu de me
livrer au commerce du bois d’ébène. C’est ainsi qu’a partir de novembre 1946, je commençai à
parcourir les villages de la vallée du fleuve ouémé.Ce sont des villages enfouis dans de grandes
brousses et très éloigné des grands centres. Mais on y découvrait beaucoup de bois d’ébène. J’avais
pris l’habitude d’aller partout avec ma bible et je faisais régulièrement mes prières.
Un jour (c’était en mai 1947), j’étais dans la forêt après avoir traversé le fleuve Ouémé. Mon
piroguier se prit de violentes coliques. Nous n’avions aucun secours. Confiant en l’Eternel, je pris ma
Bible, priai, imposai ma main sur le ventre du malade. Quelques minutes après, il se sentit soulagé.
Pris de peur, il me confessa qu’il avait pour son déjeuner puisé délibérément dans la friture que
j’avais emportée dans mes tournées. Il ajouta que je dois être un homme bizarre, raison pour laquelle
la sanction de son odieux acte ne s’était pas fait attendre. Puis il se sauva me laissant seul entre l’eau
et la forêt. Je ne savais ni nager, ni conduire une pirogue. Bon gré mal gré, j’étais inexorablement
condamné à demeurer sur place jusqu’à un secours éventuel. Néanmoins, je n’avais pas peur. La nuit,
j’allumais un feu pour me réchauffer et je priais ardemment. Le troisième jour de cette situation
désespérée, précisément le 22 MAI 1947, il eut éclipse du soleil. Depuis ma naissance, pareil
événement ne s’était produit au Dahomey. J’étais seul dans la forêt. Je pris peur et me jetai à genoux,
fermai les yeux pour prier. Au cour de ma prière, j’entendis distinctement une voix qui me disait : «
Luli, Luli, » et l’explication qui suivait : « Grâce ». Quand j’ouvris les yeux, je vis devant moi, à ma
grande stupéfaction : un singe blanc ailé assis sur son séant. Il avait deux dents à la mâchoire
supérieure et deux autres à la mâchoire inférieure. (On dirait que c’est lui qui avait prononcé les mots
Luli et grâce). A ma droite et prêt à me mordre, je vis un petit serpent marron. Il avait le cou très
gonflé surmonté d’une petite tête. (On dirait un serpent à sonnettes). Sans peur d’être mordu, je le
saisis par le collet, le caressai et le relâchai tranquillement. Puis, un peu à l’écart, je vis un oiseau
très joli. Il avait les ailes pointues et les plumes colorées. Ses pâtes et son bec sont d’un jaune nacré. Il
faisait la roue et ressemblait beaucoup à un paon. Un instant après ces animaux disparurent sous mes
yeux. Néanmoins, mon odyssée devait durer trois mois. Je n’avais plus rien à me mettre sous la dent.
Je ne vis désormais que d’eau et du miel que je récoltais en brûlant les ruches d’abeilles. J’étais
transformé, et vis dorénavant sans peur dans la prière et la lecture de ma Bible.